C’était le dernier dossier de la pile que je venais de vérifier et classer avec minutie et application. Plus qu’un dossier à étudier et ma tache serait accomplie pour aujourd’hui. Mes mains lourdes se posèrent avec délicatesse sur mon bureau pour ensuite venir glisser doucement sur la première page du dossier, mon index et mon pouce s’insérant entre les deux premières pages pour ensuite venir ouvrir l’objet de mon labeur. Au travers de mon casque de plate, j’observais avec calme les lettres calligraphiées soigneusement et avec une application. Pas de doute, ce dossier avait été rédigé par Tetsuzaemon lui-même, lui qui s‘appliquait toujours à tout faire au mieux lorsqu‘il s‘agissait de moi. J’en devinais le contenu avant même d’être allé plus loin dans ma lecture. Il devait sans doute s’agir là du rapport hebdomadaire concernant la division dans son ensemble, et mon Fukutaïsho se faisait un devoir de le remplir de la manière la plus concise et fidèle possible. Cependant, il était rare qu’un évènement soit venu troubler la paix de cette section que je dirigeais. À vrai dire, je n’avais que rarement vu des cas de troubles parmi mes subordonné, et de toute manière je ne tolérais pas les comportements perturbateurs. Ils étaient réprimés aussi sévèrement que sûrement et j’avais rarement eu à employer de mon autorité. Ma silhouette globale m’y aidait pour beaucoup, il fallait l’avouer. Lentement, je soulevais mon avant bras droit tout en le décalant sur la gauche, soulevant la première feuille contenue dans le dossier tout en commençant déjà à lire attentivement les détails de la seconde page. Mes yeux rivés sur ma lecture, feuilletant page par page mon sujet d’étude avec lenteur et patience, je ne remarquais rien d’anormal… jusqu’à la dernière page du dossier. Tetsuzaemon avait précisement noté ces mots pour cloturer son dossier.

« Cependant, Taïsho, un évènement étrange s’est produit durant la ronde de cette nuit. Deux shinigamis, dont l’un d’eux appartenant à notre division, on été attaqués durant leurs rondes à l’extérieur du Seireitei. Le problème n’a pas été pris au sérieux sur le coup, mais il semblerait qu’ils aient eu affaire à plus qu’un simple hollow. Le membre de la septième division victime de cette attaque est actuellement entre la vie et la mort, et le deuxième shinigami est déjà décédé. Le plus étrange est le fait que le hollow semble ne même pas avoir tenté de se nourrir sur leurs corps… comme si son objectif premier avait été de les tuer sans profiter de leur énergie. »

Cela m’intrigua et m’interpella. Un hollow venu uniquement dans l’optique de commettre des meurtres? Ce n’était pas normal. Les hollows sont des créatures qui obéissent à leurs instincts, et le meurtre n’est qu’une facette de la chasse éternelle qu’ils perpétuent durant leur cycle d’existence. Un hollow qui passe ce stade qu’est le dîner pur et simple d’énergie n’est plus un hollow, c’est plus que ça… mais quoi? Était-ce possible qu’il s’agisse de ce nouveau type de hollows qui avaient provoqué un incendie dans le monde réel? Ces arrancars? Nous avions rapidement fait le point sur cela avec les autres capitaines ainsi que Genryuusai-sama. L’existence même de ces individus était une menace pour la Soul Society et le Gotei lui-même, et nous nous devions de réagir vite face à ces étranges nouveaux ennemis. Cependant, je réfléchissais quelques instants à cette hypothèse. La présence de l’un des leurs était fort peu probable dans les environs, il aurait été repéré et signalé, voire éliminé sans attendre… après tout, leur puissance n’était pas négligeable. Ils avaient tout comme les shinigamis différents niveaux de pouvoirs au sein de leur groupe mais ils n’en étaient pas pour autant faibles. Alors que devais-je croire? Un arrancar ici, à la Soul Society? Dans notre entourage immédiat? Je n’arrivais pas à imaginer cette hypothèse. Se terraient-ils donc en vue d’une attaque, rassemblaient-ils leurs forces dans l’optique de venir un jour nous envahir?

Tout cela était probable. Après tout, qui pouvait bien imaginer quels plans malsains pouvaient être ourdis par les esprits de ces nouveaux adversaires? Comprendre un hollow était déjà une chose extrèmement dure à faire… alors comprendre un hollow doté d’un esprit à peu près humain et qui pouvait sans doute voir plus loin que sa soif d’âme, était une chose sans doute hors de notre portée actuelle. Du moins en prévoir les agissements les plus secrets et les plus impitoyables. C'était une raison pour laquelle j'avais choisis de prendre les armes faces à ces créatures, leur esprit vicieux et leurs tromperies. Quoi qu’il arrive, je faisais en sorte que la septième division soit prête en cas d’attaque. J’avais déjà donné mes ordres, et la majorité des Nana Ban Tai Shinigamis s’entraînaient avec plus d’ardeur au fil des jours en prévision d’un assaut de grande envergure comme d’une infiltration. Je voulais que mes hommes soient prêts, pour deux raisons: premièrement, en cas d’attaque, nous serions capable de nous défendre efficacement, ce qui pouvait faire la différence entre la victoire et la défaite. Et secondement, je voulais qu’ils puissent sauver leur vie dans la mesure du possible. Je n’aimais pas perdre mes subordonnés, que je les connaisse ou non, car leur vie avait de la valeur en tant que défenseurs de la justice comme en tant qu’individus de notre société. Il fallait qu’ils puisse préserver cette vie qui était un vrai don du ciel.

Me relevant, je refermais soigneusement le dossier avant de le ranger lentement dans l’un des tiroirs de mon bureau aux ornements boisés, faisant légèrement grincer ma chaise massive de bois, une chaise tout simplement proportionnelle à mes quelques trois cent kilogrammes. Plaçant un pieds botté de plate devant moi, puis l’autre, j’avançais lentement au travers de mon bureau pour finalement en sortir sans un mot, mes pensées indéchiffrables sous mon allure de marbre et mon casque qui cachait totalement mon visage et ainsi les expressions que j’arborais. Nul n’aurait su deviner le trouble qui était présent en moi à cet instant, cette intense réflexion que je portais sur les faits, les causes et les conséquences, le lien qui me semblait évident et totalement incohérent à la fois. Si un arrancar avait vraiment attaqué deux shinigamis et les avait vaincu, cela voulait dire qu’il était passé inaperçu malgré une puissance qui aurait du être remarquée. Si ce n’était pas un arrancar, c’était un tout nouveau type de hollow qui vivait sans s’occuper de ses instincts et qui risquait de recommencer son forfait. Dans tous les cas, je ne pouvais pas laisser la situation en l’état sans réagir. Il me fallait prendre une décision, et pour cela, m’offrir une petite promenade m’aiderait à ma réflexion. Tandis que je marchais dans les allées de la septième division, les visages se tournaient vers moi, nullement inquiets mais avec une certaine note de respect et de patience. J’aimais beaucoup mes subordonnés pour cela, cette confiance et cette fiabilité qui faisaient d’eux des hommes nobles de cœur. Des hommes d’honneur. Mes pas m’amenèrent bien vite hors des quartiers attribués à ma division, dans les allées réservées à tous. Je errais ainsi en réfléchissant de nouveau. L’arrancar, si c’en était un, était-il venu suite à des ordres ou de son propre chef? Représentait-il une menace d’invasion ou un cas isolé? Quelle était sa puissance? Si ce n’était pas un Arrancar, qu’est-ce que ça pouvait bien précisement être? Tant de questions qui restaient sans réponse… au détour d’un chemin, cependant, je vis un silhouette familière venir de la direction opposée. Marche altière, port noble, regard anthracite et inexpressif, un calme à toute épreuve… Aucun doute, il s’agissait là du capitaine Kuchiki. Continuant mon chemin nous nous croisâmes donc, et une idée me vint à l’esprit: pourquoi ne pas faire part de mes doutes au noble? Son esprit critique et analytique me serait d’une aide précieuse et je savais qu’il ne refuserait pas de m’aider si cela concernait le Seireitei et sa sécurité. Je m'arrêtais donc, bien décider à lui apprendre ce que je savais si il n'était pas déjà au courant. Cependant, c'était possible... aprés tout, je ne savais pas de quelle division était le shinigami decédé.

« Bonjour, Kuchiki Taïsho. »

Je laissais un léger silence, le contemplant de haut car j’étais bien plus grand que lui, et il se retourna vers moi sans ciller.

« J’ai à vous parler. »

Je hochais lentement ma massive tête, lui signifiant qu'en effet, j'avais bien prit connaissance de l’agression qui était survenue durant la nuit. Une chose m’étonna et me satisfit à la fois: il venait justement à ma rencontre pour discuter de ce cas. Cela signifiait deux choses: non seulement il était aussi impliqué, ce qui ne pourrait que m’aider car son jugement était toujours des plus analytiques et précis, mais également qu’il devait prendre tout cela à cœur. Les réticences du noble à parler en société n’étaient point une nouveauté du moment, et nous tous sachions qu’il n’était pas le genre de personne à déblatérer des choses inutiles et futiles pour le simple plaisir de faire résonner sa voix autour de lui et d’attirer l’attention. C’était au contraire un homme solitaire. Si il venait directement me voir pour discuter de cet incident, c’est qu’il prenait la chose très au sérieux et qu’il devait réellement vouloir résoudre ce mystère insondable. Ainsi, le second shinigami était de la sixième division… celui qui était hélas décédé des suites de ses blessures. Il avait dévoilé le dossier juste avant de me fixer pour parler. Un dossier qu’il semblait avoir emmené avec lui pour réfléchir, sans doute. Son ton était calme et impassible, sa voix atone. Le capitaine Kuchiki gardait toujours cette attitude de marbre face à son entourage, n’étant que rarement agacé, encore moins mit en colère, et cet évènement avait l’air de ne provoquer en lui qu’une froide et implacable réflexion qui, je l’espérais, porterais ses fruits en s’alliant à la mienne tandis que nous mobiliserions nos ressources pour tenter de comprendre le fonctionnement précis des évènements. Je gardais le silence tandis que nos regards se croisaient, le sien perçant au travers de mon casque pour fixer mes prunelles dorées, mes propre iris fixant les siennes qui étaient d’une couleur charbon anthracite. Le vent frais s’engouffra dans la ruelle en faisant légèrement voleter nos Haori respectifs tandis que nous restions de marbre. L’hiver approchait… je n’allais pas en souffrir, à la vue de mon métabolisme, et encore plus à cause de mon pelage qui m’assurait de ne pas être ennuyé par le froid mordant qui allait s’abattre sur ce monde comme ailleurs. Finalement, j’esquissais un léger mouvement, quasiment imperceptible, signe annonciateur d’une prise de parole imminente et sans appel. Ma voix s’éleva dans les airs de son timbre fort et grave de nature.

« Dans ce cas, il me semble que nous avions tout deux les mêmes plans en tête. »

Me retournant sans ajouter autre chose, je lui adressais un léger signe de la main, l’invitant à marcher avec moi. Puis je commençais doucement mon chemin dans les ruelles, conscient que le Roku ban tai Taisho me suivrait sans même se poser de questions. J’avançais sans trop savoir ou j’allais, à vrai dire je réfléchissais tout en progressant au fil des murs blancs immaculés du Seireitei. Notre présence combinée était comme un tableau d’opposition des plus parfaits et subtils. Les pas lourds de mes pieds engoncés dans des bottes épaisses de plate contrastaient totalement avec la note légère de ses sandales. Son reiatsu fluide et majestueux était différent du mien, plus brutal et impulsif. Même notre taille corporelle nous différenciait. La seule chose qui pouvait nous rapprocher, je crois, était cette attitude calme et posée et ce respect mutuel que nous entretenions sans toutefois être hypocrites. Finalement, tout en progressant doucement, je repris la parole d’une voix assurée.

« Cette affaire est intrigante. Je n’imagine pas un hollow faire cela. Vous non plus, je suppose. Cependant, la présence d’un de ces « arrancars » dans les environs me laisse sceptique… si tel était réellement le cas, notre vigilance n’était pas assez grande. »

Notre route se poursuivait tranquillement. Je venais d’apposer clairement et simplement ma thèse de base, ma façon de voir les choses. Peut-être qu’il la partagerait, ou peut-être que non. Mais dans le cas d’une possible présence d’arrancar, deux choses se glissaient devant ma vue d’une manière implicite: premièrement, il nous faudrait revoir nos défenses et également notre surveillance à la hausse. Si un arrancar pouvait s’approcher si prêt du Seireitei sans être repéré par qui que ce soit, alors nous pourrions être attaqués et envahis sans possibilité de contrer l’assaut. De plus, des espions pouvaient toujours rôder dans les parages, prévoir nos mouvements. Mais une chose me titillait l’esprit, plus que tout: que désiraient ces êtres? Le Hueco Mundo commençait-il à sortir de sa léthargie? D’abord les hollows qui se faisaient plus fréquents, puis ces arrancars qui sortaient de nulle part et semblaient disposer de capacités égales aux nôtres… j’avais de plus en plus l’impression que le monde creux connaissait un bouleversement interne majeur, une chose que nous n’avions pas forcément remarquée mais qui devait en pousser les habitants vers l’extérieur, vers nous. Et c’était de bien mauvaise augure. Peut-être que je me trompais, peut-être qu’il s’agissait d’un cas isolé, d’un simple arrancar errant défiant les lois de son monde pour venir assouvir sa vilénie et ses instincts démoniaques. Peut-être encore qu’il ne s’agissait pas d’un arrancar. Mais quoi alors? Là était la question, car aucun type de hollow n’aurait laissé une proie agonisante. Ils ne font pas de quartier et dévorent tout. Un nouveau type de hollow? C’était une hypothèse à ne pas exclure, mais elle me semblait moins plausible. Tandis que nous continuions notre route, j’exposais l’avancement de mes péripéties intellectuelles.

« Deux choix s’offrent à nous, selon moi. Soit l’adversaire était bien un arrancar… soit il s’agissait là d’un tout nouveau type de hollow. Cependant je ne crois que peu en cette hypothèse. Toutefois… »

Je marquais une pause en m’arrêtant, me tournant vers lui, mes yeux brillants d’une certaine lueur incisive dans l’or de mes prunelles.

« … j’ai de plus en plus le sentiment que quelque chose se trame au Hueco Mundo. Ce que nous avons connu pour le moment n’était qu’un prélude. Je suis sur mes gardes depuis cette incursion des arrancars dans le monde réel, et cet incident n’arrange pas mon état d’esprit. »

C’était la pure et simple vérité. Je ne pouvais me résoudre à la tranquillité tant que ce n’était pas réglé. Ce mystère non résolu, je ne gouterais pas à la paix la moindre minute. C’était trop dangereux de se laisser aller, surtout maintenant… nos ennemis de toujours se faisaient plus oppressants, plus menaçants. D’Après les rapports, certains arrancars avaient une force spirituelle à peu près égale à celle d’un taïsho… et c’était là une bonne raison pour rester vigilant et ne pas baisser ma garde. Je pensais soudain à quelque chose que j’avais omis de mon esprit: l’état du shinigami survivant. Si il avait réellement survécu, une petite visite ne nous couterait rien. Et si il était réveillé… nous pourrions enfin savoir de quoi il s’agissait vraiment. Ma voix s’éleva, respectueuse et forte.

« Que diriez-vous de vous rendre aux quartiers de la quatrième division; Kuchiki Taisho? Mon subordonné blessé est toujours là-bas. J’aimerais savoir m‘enquérir de ses nouvelles, et possiblement récupérer des informations. De plus, je serais ravi d’entendre vos hypothèses sur la route, si toutefois vous souhaitez les partager. »

Je ne pouvais qu'accéder à la requête ainsi posée de mon collègue. De plus, le bien fondé de son absence dans les infirmeries était tout à fait justifié: en effet, que deux capitaines se déplacent ainsi de concert pour s'enquérir des nouvelles d'un simple shinigami de la cours serait à coup sur un fait étrange que les gens ne manqueraient pas de remarquer. Ainsi je rentrerais dans les salles de repos seul, pour savoir comment la santé de mon soldat évoluait. Kuchiki-Taisho avait marqué un autre point important: il s'agissait là d'un membre de ma propre division, c'était donc à moi qu'incombait la tache de pénétrer dans le bâtiment de la quatrième division pour récolter les diverses informations dont nous avions besoin. Tandis que je le suivais de plusieurs shunpo, je réfléchissais à ses propres hypothèses. Quelqu'un qui s'évertuerait à changer les hollows, à les modifier... des assauts pour nous connaitre, des essais et rien de plus. Nous concordions. Mais nous devions rester sur nos gardes, nous n'étions pas plus à l'abris d'une erreur de jugement sous prétexte que nous arborions le haori blanc des capitaines du Gotei 13. Cependant toutes ces idées n'étaient pas dénuées de sens, au contraire, tout semblerait s'expliquer si il s'avérait que quelqu'un tirait les ficelles des hollows comme un marionnettiste habile qui se jouerait de nous sans que toutefois, nous ne soyons capable de le trouver ou même prouver son existence. Si une intelligence supérieure avait ourdie tout cela, alors nous devions redoubler de prudence. Comme il valait mieux trop que trop peu, je comptais bien mettre mon sens de la rigueur en pratique pour pousser ma division dans les temps qui viendraient. Ils fallait que mes hommes soient prêts au combat, quoi qu'il advienne, car la guerre ne prévenait pas... et frappait à l'aveugle. Personne ne pouvait se vanter d'être à l'abri de la mort et des blessures. En tant que Taisho, je me devais en outre d'inculquer des valeurs morales aux hommes sous mes ordres, et c'était une façon indirecte pour se faire. Des entraînements plus fréquents leur ferait vite comprendre que la situation n'était pas à prendre à la légère, surtout pas maintenant, alors que nous étions assaillis par des forces dont nous n'avions jamais connu l'existence auparavant.

L lorsque nous nous posâmes devant les quartiers de la quatrième division, j'observais attentivement les murs immaculé, perdu dans mes pensées. Kuchiki-Taisho comptait m'attendre ici, aussi n'avais-je pas de temps à perdre. Il ne fallait pas le faire patienter inutilement, d'autres affaires devaient l'attendre, et bien que celle-ci pu se révéler potentiellement importante... il fallait que nous réglions la chose au plus vite possible, car malgré tout, l’avenir du Gotei pouvait possiblement dépendre de nos conclusions et des décisions que nous prendrions en conséquence.

« Veuillez m’attendre ici, s’il vous-plait, Kuchiki-Taisho. »

Sur ces mots énoncés purement et simplement d’une voix neutre mais respectueuse, je commençais ma marche dans les allées de la quatrième division, cherchant à joindre rapidement l’infirmerie. Ma démarche était calme et posée mais mon pas assez rapide, montrant que si mon état d’esprit de ce moment n’était point troublé par l’infortune ou autre, j’avais à faire. Quelques shinigamis me saluèrent avec respect en courbant l’échine, et je ne répondais que d’un hochement de tête rapide, toujours dans l’optique d’atteindre vite ma destination. Finalement, je pénétrais dans le bâtiment qui servait d’hôpital au Seireitei, me rendant à l’accueil de ma démarche assurée, mon ombre colossale se découpant sur le plancher. La shinigami qui s’occupait de l’accueil sembla surprise de me voir et également quelque peu intimidée, mais cela ne l’empêcha pas de faire comme elle devait sans doute avoir l’habitude de procéder, à mon plus grand soulagement. Je n’étais pas très à l’aise à l’idée de laisser ainsi mon collègue sur la pas de la porte, cela ne corroborait pas avec mes principes les plus inaltérables. Cependant c’était sa volonté, aussi n’allais-je pas m’y opposer.

« Komamura-Taisho, vous… vous cherchez quelque chose? »

Elle m’observait avec de grands yeux bruns dans lesquels brillaient une certaine note de stress, un effet que je semblais produire à mal de monde et qui me faisait intérieurement soupirer quant à ma condition. Opinant doucement du chef, je lui jetais un regard calme au travers des fentes de mon casque de plate, ma meilleure défense contre l’extérieur.

« Oui. Le Nana ban tai Shinigami qui à été blessé gravement cette nuit, s’il vous-plait. »

Elle s’affaira ainsi à rechercher le dossier correspondant dans des gestes qui semblaient pour le moins précis et assuré, mais sa main qui tremblait légèrement me montrait son inexpérience. Elle devait sans doute être nouvelle, les gens s’habituaient à moi, à la longue. Je n’allais pas lui en tenir rigueur… après tout, elle n’était pas la cause de ma monstruosité, seul le ciel était à blâmer de cela. Finalement, elle soutira un dossier de ses tiroirs et le feuilleta rapidement, ses traits fins s’illuminant. Elle avait trouvé.

« Hogaïtsu Kira. Deuxième couloir, vingt-quatrième chambre. Il est dans un demi-sommeil mais il s’est réveillé il y à peu. »

Je gardais le silence. Je pourrais peut-être lui demander ce qui lui était arrivé avec plus de précisions, si il s’était réveillé suite à son agression. Et son état semblait donc s’améliorer, si il pouvait désormais reprendre connaissance. Je hochais légèrement la tête en signe d’accord et de remerciement.

« Sôka… Arigatô. »

Me retournant lentement, je m’enfonçais ainsi dans le premier couloir, le parcourant sans m’occuper des pièces attenantes. Ma destination ne se trouvait pas là. Il fallait que j’emprunte le deuxième couloir, ce que je fis sans hésiter. Mes pas massifs résonnaient dans le couloir et j’observais les numéros qui défilaient, inscrits dans des plaques de bois située au dessus des portes coulissantes traditionnelles. J’arrivais enfin à la vingt-quatrième pièce. Plaçant mes deux mains massives sur les plaques coulissantes qui constituaient la porte de bois légère, je les fis glisser sur le côté pour rentrer calmement dans la pièce. Le shinigami semblait bien amoché. Il avait de multiples contusions sur le visage et son torse avait visiblement était découpé à plusieurs endroits qui cicatrisaient encore. Il ne sembla pas remarquer ma présence sur le coup, mais lorsque je m’approchais, il tourna lentement sa tête vers moi, les yeux mi-clos. Sa respiration était difficile mais il avait l’air stable. J’espérais de tout cœur qu’il puisse s’en sortir. Ses lèvres s’animèrent.

« Koma…mura… Taisho…? »

« En effet. Hogaïtsu Kira, n’est-ce pas? je suis heureux de voir que tu as survécu. »

« Je… n’ai pas été assez… »

Je coupais immédiatement cours aux reproches inutiles qu’il allait se lancer à lui-même d’un geste vif de la main. 

« Ne dis rien. Nul ne pouvait prévoir cela. Mais j’ai besoin de toi, Kira. Que s’est-il passé? »

Il regarda fixement le plafond et ses yeux se figèrent tandis qu’il semblait se remémorer la scène. Cela prit plusieurs minutes avant qu’il ne puisse parler, mais il déclara finalement d’une voix brisée… brisée par une sorte d’angoisse qui se palpait dans son ton.

« C’était… la nuit… Je patrouillais avec… avec un membre de la sixième… quand ce démon est apparu… »

« Démon? »

« Oui… son reiatsu s’apparentait à celui d’un hollow… mais il était beaucoup… plus fort qu’un hollow… et il avait forme humaine… et ce regard… ce regard..! »

Son discours se faisait de plus en plus entrecoupé et sa voix semblait devenir plus paniquée. Il était visiblement traumatisé par sa rencontre. Je m’approchais de lui pour placer doucement ma main sur son épaule, l’incitant à garder son calme et se reposer. Il était d’ailleurs lui-même exténué et son regard se voilà tandis qu’il semblait sombrer. J’observais son visage au travers de ma visière. Cette peur dans son regard… j’en avais rarement vue une aussi forte. Il avait survécu à une agression des plus traumatisantes et il me faudrait veiller sur lui lorsqu’il réintégrerait la division en tant que shinigami. M’éloignant du lit, je sortais de la chambre en lui parlant une dernière fois.

« Tu as été courageux. »

Je fis de mon plus rapide pour sortir des quartiers de la quatrième division. Tout correspondait. La forme humaine, le reiatsu de hollow, et apparement, la folie sanguinaire qui allait avec… il fallait que je m’en réfère à mon collègue au plus vite. Sortant de l’allée principale, je le vis qui attendait patiement à l’entrée, l’attitude toujours aussi fière et digne qu’à son habitude, nullement ennuyé -du moins en apparence- de cette attente que je lui avais imposée. Je m’approchais de lui avec lenteur pour confirmer nos hypothèses d’une voix forte.

« l’agresseur avait forme humaine. Et un reiatsu de hollow. »